Le mauvais cuir

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Proposée le 1/07/2007 par annedarobace

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Femme de port (1ère partie)

1) Le mauvais cuir

J'ouvre les cuisses. Le cuir de ce fauteuil anglais ne me plait pas, de la mauvaise qualité certainement, quand le revêtement colle à la peau, c'est que le cuir est mauvais. D'ailleurs, ce fauteuil... Il me fait penser au canapé de mes beaux-parents, du simili aussi somme toute, avec des espèces de pieux qui le traversent, pour presser et oppresser, bien serrer la bête, avec le dossier haut donc le regard hautain, d'un bon maintien il est vrai sur les cotés mais des accoudoirs évasés, évasifs... alambiqués... Je n'aime pas ce fauteuil, d'autant que l'on y est mal assis, c'est çà le pire ! On y joue et on y glisse, on y gagne à être vu mais les maigres moyens de la compagnie ne doivent pas nous permettre de faire mieux :
On a choisi l'apparence plutôt que l'efficacité...
"Y'a pas qu'chez nous ! " j'entends dire... Moi, je me contente du style, c'est mon outil de travail... Faut dire aussi...

J'ouvre les cuisses. J'écarte encore un peu plus pour découvrir cette fente mystérieuse. C'est à ce moment là généralement que le silence est d'or. Juste quelques secondes de gorges nouées et de souffles retenus, juste un instant avant que ne monte le bruissement salvateur, la délivrance qu'ils attendaient, le Mmm ou le Ahh qui les libèrent. Après, la tempérance fait que, ce lieu qui les ignore, les devine confus et impudents, enfermés dans leur paradoxe, à la fois heureux d'être ici et honteux d'être là. Chaque soir c'est un jeux différent pour ces semblables, l'atmosphère s'alourdie au gré de leurs humeurs mais ce qu'on subodore se révèle toujours être à l'identique : les hommes se distinguent et se ressemblent tous !

Déjà, avant que le rideau ne soit levé, la lumière s'est éteinte, ne reste qu'un tamisé rouge et jaune à peine perceptible. Juste un rai de gaieté dans ces velours ridicules et sinistres, ridiculement sinistres. Il ne faut pas qu'on les voit. Il ne faut pas qu'on les reconnaisse. Pas de faux pas SVP !
Non, ces gens là, ils passent dans la rue, par hasard, dans le quartier chaud, entre la froidure du port et le centre déserté, la nuit est claire, le Dam n'est pas si loin, les dames sont si proches, ils découvrent l'affiche, leur regard s'est égaré, ils jettent un oeil aux alentours des fois que, ils respirent un grand coup et ils rentrent. C'est une victoire, ils ont osé... Tu vois c'était facile, puisque tu es là... Sans faire exprès... La caisse est discrètement placée à l'abri par la porte auvent, tant mieux, les autres n'en sauront rien. En tremblant un peu, ils cherchent le billet qui donnera le ticket qui donnera la suée - du moins l'espèrent-ils -, le sésame est cher mais on ne peut s'en priver, puisqu'on est là, çà fait tellement longtemps qu'ils en avaient envie... , et puis au diable l'avarice, demain sera un autre jour...
Ils ne sont pas seuls et çà, çà les embêtent, mais ils ne se voient pas, ils ne se reconnaissent pas, pas de faux pas jusque là, alors ils cherchent dans ce rouge pompeux, la meilleure place pour voir sans être vu - une reconnaissance près de l'allée centrale - on ne sait jamais, mais tout est pris, il faudra se résoudre à s'asseoir juste au bord, l'estrade est à un mètre, tant pis, on verra bien mais les autres aussi . Çà, çà les embête... Mais ils sont là à " l'insu de leur plein gré " ... Destin quand tu nous tient...

Ma main descend lentement le long du corps, elle s'attarde sur le téton, il se durcit encore un peu s'il le pouvait - il aime, le téton - mon ventre attise la caresse, mes doigts s'égarent vers le nombril, un trou qui n'en est pas, il n'y à rien à combler alors, alors, puisqu' ILS attendent, puisqu' ILS le veulent, je ne peux pas les faire languir davantage... Et moi non plus : ma main se perd entre mes jambes...
Oh, bien sûr, le geste est récurrent, mais on ne s'y habitue pas. C'est une perpétuelle sensation de découverte, la caresse est banale et le plaisir unique. Il y a mille chemins, il y a mille espoirs, il n'y a qu'une solution pourtant : l'Évidence.
Les " PAR 15 " m'éblouissent. Ces satanés projos me cachent tout ces "je suis là par hasard "... Du moins après le troisième rang. Je les devine, le regard probatoire, s'interrogeant ainsi un peu sur mes capacités et beaucoup sur les leurs, je les sens, leur transpiration coupable les imprègne, je les touche à ma façon , virtuelle que j'aime être, ils sont tendus pour ne pas dire crispés, réels, eux.

J'appuie sur le bouton, celui qui allume la lumière dans leurs yeux. Moi, les rayons me transpercent, m'accablent et me chavirent. Mes doigts se réservent à l'envie; seul, tout seul, l'index de la main gauche trace sa ligne de plaisir sur mes lèvres endormies, le réveil n'en est que plus charmant.
La main droite en soutien, je relève un peu la jambe, il faut qu'ils voient tout ce que je peux montrer, ils ne doivent rien ignorer de mon intimité, c'est le contrat, c'est mon deal, mon plaisir et le leur, eux pour moi et moi pour tous. L'exhibe est quelque chose de fort. Cela fait peut-être 3mn que je suis nue, attisant leur regard, égayant leur soirée, je suis déjà ailleurs, transportée et prise par... le jeu...
L'excitation s'emballe, tout à l'heure, quand la suite surviendra, je ne serai plus moi je crois, il me semble que je ne supporterai pas ce plaisir démoniaque, et pourtant, à chaque fois, pour eux un peu, pour moi surtout, je recommence.

Je ne résiste pas bien longtemps. Ces orifices mis à l'index, pleurent leur condition. C'est un soulèvement, pas une révolte : juste une évolution. Caresser le clito puis ces lèvres charnues, d'un doigt ne suffit plus ! Il me faut du renfort pour tout ce réconfort. C'est donc la main entière qui s'active à mon con ! Je n'amuse pas l'terrain, je branle la galerie ! Les doigts se livrent à des caresses sans concession, passant et repassant le long de l'entrecuisse, appuyant leur attaque par de brefs attouchements clitoridiens, jetant leurs forces au centre de mon corps, oui, là, juste là, où le désir est le plus fort : un majeur courageux s'enfonce dans mon vagin, j'y laisse quelque énergie mais aussi bien des râles. " La foule " beugle avec moi... en catimini...
" Un con est un être délicat et fragile, la preuve, il pleure quand on l'caresse ! "
J'ai le con qui pleure, mais ' y'a tout ces cons qui rient, qui ahanent et qui suintent. C'est pour eux que je suis là et je veux du respect !
Certain en ont, du respect... et d'autres choses sans doute... comme cet homme ici, au premier rang, à un mètre de l'estrade, sur ma droite, comme il a l'air gêné ! (C'est pour mieux t'apitoyer mon enfant), comme il parait surpris ! (C'est pour mieux t'émouvoir ma chérie) et comme il a l'air petit ! (C'est pour mieux te pourfendre, quand tu sera à lui)... comme il paraît... je parais... comme il a l'air sincère... et coquin...

Je ne vois plus que lui qui ne voit plus que moi. Nos regards se sont croisés, nos destins quelque part.
Malgré les projecteurs, je distingue ses yeux bleus ou verts je ne sais, tendance de braise en tous cas, tellement le feu s'allume à chaque échange. Ses cheveux poivre et sel trahissent sa quarantaine, il a aimé la vie comme la vie l'a détesté peut-être, quelque chose le caractérise mais je ne sais pas quoi encore, je l'ai remarqué, lui, quidam expiatoire. Il est venu- le hasard ? - j'étais là - de la provocation ? -
Il me touche avec ses yeux, je lui donne avec bonheur, je me tourne un peu vers lui -excentré -, pour qu'il savoure ce moment de partage, faute professionnelle, j'ignore les autres pour m'attirer à lui et je ne devrais pas, c'est pas le contrat, pas le deal...
Il ne dira rien, mais je sais qu'en son for intérieur il bout assurément.

Les autres - ILS -, m'invectivent en silence. Je connais tous leurs mots, je sais toutes leurs rancœurs, pas contre moi, contre ILS :

" Humm, Salope ! C'est çà vas-y caresse toi le bouton, mets toi un doigt dans la chatte, oui voilà, continue, t'aime çà ma chienne hein ? ; N'hésite pas, je veux un doigt dans l'cul maintenant, tu vois qu'çà fait du bien, ahh la pute si j'pouvais monter sur scène qu'est ce que j'lui mettrais, ah la vache, elle est insatiable cette gonzesse... "

Puisque je sais tout leur discours, j'anticipe mes mouvements. Je me lèche les doigts que j'enfourne à nouveau, j'ai le regard coquin envers ceux que je vois, je leur jette mon corps en pâture, il y a les regards coquins de ceux que je ne vois pas, ILS ne me jettent pas la pierre, ILS en redemandent :

" Allez vas-y branle toi bien Salope ! Écarte bien les cuisses que tout le monde en profite, ha çà a l'air de te plaire de te doigter en public ! Continue ma petite pute adorée tu vas y arriver... voila, comme çà, encore, sois pas timide ( !), Mets toi les deux doigts, oui, dans le fion, c'est çà, et ton autre main, voila, parfait, dans le con, bah dis donc ! Si avec çà tu jouis pas ! Oh putain de salope de chienne !!! "

C'est vrai, je suis au bord de la jouissance. ILS l'ont bien senti. Mes index, majeurs et compagnie, fourragent à qui mieux mieux, tous mes trous investis, je vais bientôt me livrer, trop de cyprine a coulé, je dois sortir vaincue ou me rendre... à l'Évidence, Il faut que je me calme, ou que je n'explose, ce n'est pas dans le contrat çà, quel dilemme !
Je suis trop chaude pour réfléchir et mon temps est compté (si si ! ), bientôt il sera trop tard, je dois prendre la décision maintenant, en pro, comme une femme de caractère, comme une pute qui sait se tenir, comme une Salope d'envergure, le S majuscule SVP, comme une grande dame !

Alors ?

Alors, j'entends le public dispenser ses humeurs au travers du théâtre, c'est comme un râle unique, commun et solidaire, comme un, ... et solitaire, avec moi çà fait deux, çà fait d'eux des gens bien quand on y pense, le partage çà fait du bien en passant...
J'ai choisi la tautologie, m'abandonner à la victoire: je jouis, je jouis, je jouis !
ILS entendent cette jouissance et ils me la renvoient, boomerang. J'exclame leurs plaisirs, ils n'attendaient que çà les salauds !, ils en réclament encore, il faut que je leur donne une suite pour assouvir toutes ces privations, ces angoisses et ces haines; Ce râle est inhumain, mais c'est çà qu'ils voulaient, jeter toute cette souillure qu'ils croyaient seuls à détenir : ils se disaient mauvais, ils découvrent que c'est bon, être ensemble, à jouir comme tout le monde, c'est une communion entre moi et eux... je sais qu'ils apprécient ce moment solennel et je ne me fait pas prier, à deux doigts du blasphème, le pilori non merci... ni même le pilon... je libère toute les âmes de leur mauvaise conscience et la mienne en même temps ! Dieu que c'était bon !

...

Je m'abandonne ainsi, quelques instants sereins, qu'ILS reprennent leur souffle et que je reprenne "mes esprits ". Dans cette lascivité temporaire, je me sens un peu conne d'avoir joui sans retenue comme une amatrice, putain je suis une pro quand même ! J'aurais dû ! J'aurais pu ? En tous cas je sais qu'eux au moins n'ont pas trop de regrets, leur ticket chiffonné dans le fond de la poche, cela valait la peine que je leur ai vendu.
ILS attendent la suite. Et si c'était fini ? Après tout, ils m'ont vu... me dévêtir, m'asseoir sur ce mauvais cuir, me caresser sans complexe ni raison... ILS m'ont vu de leurs yeux, à un mètre de l'estrade, presque à pouvoir me toucher, et surtout, surtout ! ILS ONT JOUI COMME J'AI JOUI, ENSEMBLE ! ON A JOUI !
Cela devrait suffire non ?

Lui, il reste là. Il a apprécié sans doute la prestation que je leur ai offerte, mais il se doute bien que le spectacle ne s'arrête pas là. Peut-être un peu plus courageux, sans doute un peu plus inconscient ou même encore plus déluré, il a dû s'attarder sur les affiches de l'entrée. Il a vu ces quelques clichés de la scène à plusieurs, des photos racoleuses certes mais combien excitantes, le quidam ordinaire, pléonasme coquin, ne put se retenir... alors il sait qu'il faut rester.

Au début du spectacle, ils sont un peu gênés. Ils n'osent regarder autour d'eux de peur qu'on les reconnaisse, ils matent un peu quand même, des fois qu'eux reconnaissent... et puis comme dans tous les théâtres du monde, les trois coups retentissent, ils sont " dedans ".
J'ai mon cœur qui bat à 100 à l'heure lorsque je rentre sur le plateau, le lourd tissu s'efface, je suis
" Devant ", je suis à eux.
Au théâtre ce soir, les décors ne sont pas de Roger Harth et Donald Cardwell est au chômage. Minimaliste est mon salon, maximiser est le but du gérant... il y a un fauteuil et une table basse... un miroir et un bar en retrait... cela suffira bien pour faire ce que l'on a à faire...
Je pénètre dans cette antre. Il n'y a pas d'applaudissements, au mieux une légère intention. C'est qu'ici les gens sont discrets vous savez, d'ailleurs il n'y a personne dans la salle, simplement des passants qui jettent un oeil, comme çà... juste comme çà... alors...

Alors ?

Alors, je joue mon rôle de femme rentrant à la maison après quelques courses éreintantes, j'avance d'un pas décidé dans mon pseudo appartement, je pose mes sacs près du pseudo mauvais fauteuil en soufflant largement pour montrer ma fatigue, et comme pour toutes les pseudo ménagères lassées de leur journée , je décide de faire un strip-tease devant le miroir du salon... tout ce qu'il y a de plus naturel en somme, la vie en raccourci, le Théâtre avec un grand T, du Cocteau ou du Goldoni, presque Racine en plus léger... , presque Feydeau en plus sérieux... presque.
Subrepticement, les bretelles glissent une à une. Lentement afin de parfaire ce public, je laisse descendre la fermeture de ma robe. Je suis devant la glace. Mon corps se dévoile peu à peu aux regards indécents, l'étoffe qui me cachait est maintenant à terre, je me découvre pourtant tandis que la chaleur m'étouffe.
D'un profil approximatif, j'offre mon point de vue. Ils me toisent, je me tais, y'a rien d'intéressant à dire. Je parle à l'intérieur de moi. Une voix. Qui m'encourage et qui me tanne ! Un souffle interne, entre la raison et l'envie, l'excitation est à ce prix : Je suis une Salope voyez vous !

Lui, il reste là. Assis près de l'estrade, près du miroir. Je ne l'ai pas remarqué encore. Lui a déjà fait le rapprochement. Il me regarde, que dis-je ! il me pourfend, me traverse et m'ausculte : il me voit peu à peu, prenant chaque images pour les mettre dans sa poche (celle de gauche ), il me devine petit à petit et s'interroge sur la finalité, "être ou ne pas être ", j'expire, çà l'inspire... c'est bien du théâtre...
Mon soutien gorge ne soutient plus rien. Toutefois il faut remarquer qu'il n'avait pas grand chose à soutenir. Maintenant qu'il est sur le rebord du psyché, ballottant et ballot, mes seins se sentent libres comme l'air, j'inspire, lui... expire...
Ne reste que le bas. Les bas et tout cet attirail qui fait de moi une pute. Attirer le mâle, voilà ma raison d'être. Alors, mes ustensiles de cuisine au fessier, je m'accommode, néo-moderne et rétro-silencieuse dans cet accoutrement. Je soulève une à une, les jarretelles qui portent, j'enlève délicatement ces dessous qui m'habillent, j'active la libido de ces hommes perdus, bientôt je serai dévêtue, totalement impudique, soumise à leur vindicte et à leur tutoiement.
Lui, il ne perd pas une miette, il me voit sans détours, presque, il pourrait me toucher, presque, il attends son tour... peut-être... un jour... pas cette nuit...

A SUIVRE...

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